Dans son édition de mardi, Le Monde, sous la plume de Jean Birnbaum, signe une critique d' "OPA":
Dans les périodes de montée aux extrêmes, les livres dignes ont tendance à se raréfier. Ils ne s'en repèrent que plus aisément : au moment de les refermer, on comprend que leurs auteurs, pour avoir refusé de choisir tel ou tel "camp", ne se sont fait à peu près que des ennemis. En atteste l'ouvrage signé par Cécilia Gabizon, reporter au Figaro, et Johan Weisz, journaliste à Radio Shalom, consacré à l'actuel malaise des Français juifs.
Certes, on pourra regretter le titre un rien tapageur. Car se focaliser sur l'opération "Sarcelles d'abord", imaginée en 2004 par l'Agence juive (organisme chargé de favoriser le "retour à Sion") dans l'espoir de faire venir "30 000" nouveaux immigrants en Israël, c'est jouer avec le fantasme d'un "exode programmé", alors que le livre lui-même démontre combien cette "opération" aura été à la fois banale et vaine.
Banale, d'abord, parce que, depuis ses origines, le mouvement sioniste se fixe pour objectif de rassembler les juifs en Israël ...
Après avoir épuisé ses possibilités au Maghreb, en Ethiopie ou en Russie, il n'est guère surprenant qu'il se tourne notamment vers la France, où vivent environ 500 000 juifs, dont beaucoup ne cachent plus leur inquiétude devant la recrudescence des actes antisémites. Vaine, surtout : après des mois de porte-à-porte dans les HLM, il se sera trouvé à peine plus de 2 000 candidats au départ. Du reste, pour beaucoup d'entre eux, l'aventure sera de courte durée : d'origine modeste, peu diplômés, ils ne pourront s'intégrer à une société israélienne minée par la guerre et le chômage.
Et c'est ici que l'enquête se révèle féconde : faisant le récit de ce fiasco, Gabizon et Weisz ne se contentent pas d'explorer cette frange du judaïsme qu'on appelle "communautaire". Ils vont également à la rencontre de ce qu'on pourrait nommer le "judaïsme d'en bas", celui des "petites gens" et des "cages d'escalier miteuses". Essentiellement composé de Séfarades (issus des pays méditerranéens), ce judaïsme-là porte la mémoire du monde colonial. On s'y souvient qu'au Maroc, par exemple, les juifs étaient soumis à un statut inférieur : "Il fallait descendre du trottoir pour laisser passer un musulman", témoigne Michel Serfaty, rabbin à Ris-Orangis, où il anime un groupe d'amitié judéo-musulmane.
Or les plus fragiles socialement, ceux qui n'ont pu fuir les cités difficiles, supportent de moins en moins les agressions spécifiques dont ils sont victimes : "Mikaël s'est fait rosser plusieurs fois : la semaine dernière, une bande l'a coincé dans les toilettes. Ils lui ont fait boire l'eau de la cuvette (...) avant de lancer, fiers d'eux : "Crève ! Vive la Palestine !"", raconte un père de famille. Dans ce contexte de précarité et d'angoisse, une partie de cette population est tentée non par un exil physique, mais par un "exode mental". Convaincue que les médias traditionnels déforment la vérité, elle se tourne vers des sites Internet de "ré-information", où prolifèrent raccourcis et amalgames, voire "une suspicion aveugle et générale envers les Arabes".
D'une plume précise et hardie, les auteurs abordent des questions qui fâchent. S'ils ne minimisent en rien la réalité du climat judéophobe, ils soulignent la dangereuse dérive d'une minorité, livrée à la rhétorique exaltée de quelques intellectuels peu scrupuleux. A un an de la présidentielle, certains maîtres à penser ne semblent avoir qu'une idée en tête : instrumentaliser "le sentiment d'isolement des juifs" afin de fustiger la gauche antiraciste et de prêcher la "défense de l'Occident", quitte à faire alliance avec des hommes parfois directement issus de l'extrême droite française. Contre le spectre "islamo-gauchiste", le salut devrait-il venir d'un improbable sursaut "judéo-maurrassien" ? C'est fort douteux.
Jean Birnbaum
Je crois effectivement que cet article du Monde reflète bien la réalité. En écrivant le livre , vous deviez déjà imaginer que vous alliez vous faire des ennemis, non ? Autre question, vous êtes vous (quand mmême!) fait quelques amis ?
PS: Je viens de terminer votre livre, et j'ai bien aimé la partie sur les sépharades. Je ne suis pas d'accord sur tout, mais en général, personne n'en parle des sépharades !
Rédigé par : Richard | 17 mai 2006 à 16:05
article refletant bien la réalité, pour une fois que le monde est ds le vrai on va ps se plaindre !!
Rédigé par : Sympatoche | 18 mai 2006 à 09:07
Jo je t'aime!!!!! T'es le meilleur!!!!!!!!! Génial l'article du monde.
Rédigé par : Anne O'nyme | 18 mai 2006 à 11:04
Pour répondre à vos questions, je savais, pendant les deux ans et demi d'enquête et d'écriture du livre, que ce travail ferait réagir quelques mécontents, mais jamais je n'avais imaginé que j'aurais aussi gérer des déclarations d'amour !
Rédigé par : Johan | 18 mai 2006 à 16:05